La diffusion de l’innovation et du digital au sein des entreprises est de plus en plus tournée vers l’externe. C’est ce que montre la seconde édition du baromètre des pratiques digitales des grandes entreprises, publié le 4 octobre 2016 par Econocom, Sia Partners et l’Ifop. Cette étude, réalisée grâce à la participation de plus de 400 décideurs issus de plus de 329 grandes entreprises françaises, donne des indicateurs précis sur les dispositifs et stratégies mis en place par les grands groupes pour faire naître l’innovation et accélérer leur transformation numérique.
48% des grandes entreprises ont établi des partenariats avec des entreprises innovantes
Alors que la pratique de l’open innovation est en léger recul (40% des entreprises y ont recours en 2016, contre 48% en 2015), les entreprises s’orientent davantage vers un écosystème externe pour diffuser l’innovation et le digital. Au-delà des bénéfices premiers de cette ouverture (accélération des cycles d’innovation, sollicitation de compétences humaines et techniques pointues, etc), ces initiatives ont un impact positif sur l’image de marque de l’entreprise.
Beaucoup misent sur des partenariats avec des entreprises innovantes (48%) ou des incubateurs et pépinières extérieurs (26%). Certaines créent leur propre incubateur de start-ups en interne (12%) ou mettent en place un fab lab (21%, vs. 16% en 2015). Parmi les dispositifs cités, on note aussi le financement de start-ups externes (20%, vs. 11% en 2015) ou le rachat d’entreprises innovantes (16%, vs. 13% en 2015).
Les stratégies adoptées diffèrent en fonction des secteurs d’activité. Ainsi, les télécoms/média privilégient les partenariats avec des entreprises innovantes (69%) tandis que le BTP investit plus largement dans les incubateurs/pépinières de start-ups (59%) et la bancassurance directement dans le financement de start-ups (49%).
En avril 2016, nous étions entrés dans les coulisses du Village By CA. Pour Fabrice Marsella, le « maire » de la pépinière de start-ups innovantes du Crédit Agricole, il s’agit d’un « outil qui permet de faire bouger les lignes ». Start-ups incubées, grandes entreprises en recherche d’innovation et PME peuvent y dialoguer pour « créer les hybridations permettant aux uns et aux autres d’être inspiré, de se développer et de créer de nouvelles offres ». Tout est fait pour raccourcir les circuits et concentrer les évènements intéressants : « Le Village est un lieu d’expérimentation de nouvelles organisations. Nous tendons à un modèle horizontal où chacun est susceptible de contribuer à l’aventure, dans un esprit d’intrapreneuriat. »
Autre exemple : le Shaker, imaginé par le fonds d’investissement Partech Ventures et plusieurs partenaires, dont Econocom qui s’est notamment chargé de l’équipement du lieu en outils digitaux. Dans les 2 200 m2 de ce campus de l’open innovation se côtoient start-up et grands groupes. Pour Bruno Grossi, Directeur Exécutif du groupe Econocom, « ce type de rapprochement donne surtout une idée de la vitesse à laquelle les transformations digitales déferlent sur l’économie française ».
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Les évènements sur le digital font salle comble
Autre marque d’ouverture sur l’extérieur : le succès des évènements, salons ou conférences sur le thème de l’innovation, du digital et des nouvelles technologies. En 2016, 63% des répondants ont y ont participé, dont 40% en tant qu’intervenant (speaker, stand, etc) et/ou sponsor.
La visibilité apportée par ce type d’évènements ainsi que leurs débouchés commerciaux ont surtout convaincu les acteurs de l’ingénierie/conseil et des télécoms/media.
Quand l’utilisation des outils digitaux bouscule les espaces de travail
Dans 56% des entreprises, l’utilisation de solutions numériques au quotidien a fait évoluer les bureaux et espaces de travail physiques. Elles sont par exemple 36% à avoir créé des open spaces au sein de leurs locaux et 16% à proposer à leurs collaborateurs des espaces de co-working en dehors de leurs murs.
Le télétravail est également une pratique soutenue par plus du quart des entreprises (26%). Dans le secteur de l’ingénierie/conseil, elles sont mêmes 50% à inciter au télétravail.
« Le télétravail permet d’acculturer les salariés aux usages numériques et collaboratifs : ils sont obligés de s’y mettre pour gérer les relations à distance », nous expliquait en février 2016 Xavier de Mazenod, créateur de Zevillage, le site de référence sur les nouvelles formes de travail en France. « Dans les entreprises, beaucoup de transformations organisationnelles commencent par une mise en place du télétravail, ajoutait-il. Le nombre de télétravailleurs dépend aussi de la culture de l’entreprise : dans certains groupes, les managers sont ouverts et plus éclairés sur l’usage du numérique. »
« Pour les grandes entreprises, l’enjeu du télétravail, c’est de se mettre en conformité au regard de la loi et de surmonter les résistances liées à la culture du travail, souvent régie par des horaires de présence dans les bureaux », nous indiquait Frantz Gault, directeur général de LBMG-Worklabs, une start-up qui conçoit des solutions destinées à permettre aux entreprises et aux organisations de travailler autrement. Pourtant, le jeu en vaut la chandelle : en général, plus 15% de productivité. « Il y a des freins avant de passer au télétravail, mais, une fois que le cap est passé, on se rend compte que 98% des équipes sont satisfaites. »
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La révolution digitale pousse les grandes entreprises à faire évoluer leurs usages, à s’inspirer de la force d’innovation de jeunes pousses et à investir des espaces conçus pour favoriser les synergies. Pour tenir un rythme toujours plus rapide, l’ouverture semble indispensable et la collaboration avec des partenaires agiles fait naître des échanges vertueux. La recette du succès ? Accepter une certaine souplesse. « Il y a plus d’innovations qui naissent des imprévus que des démarches très structurées », nous disait en effet Claudio Vandi, directeur des activités d’innovation du NUMA, l’un des lieux phares de l’innovation à Paris.