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#Cobotique : quand les robots se mettent au service des hommes

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Un robot pour accomplir les tâches pénibles à la place de l’homme ? L’image semble issue d’un film de science-fiction. Pourtant, dans le secteur de l’industrie, c’est déjà une réalité. Au croisement de la robotique, de la biomécanique et de l’humain, la cobotique, un néologisme qui vient des mots « coopération » et « robotique », est une technologie émergente qui a pour objectif d’automatiser un large panel de tâches via l’interaction entre un opérateur humain et un système robotique. Comme l’explique le site d’Actemium, concrètement, un cobot a pour objectif de travailler en interaction avec l’homme, au plus près de lui, au contraire d’un robot qui travaille seul.

 

Patrick Mariage, à la tête de l’entreprise Actemium Poissy (marque industrielle du géant VINCI Energies) est l’un des pionniers français de la discipline. La cobotique, c’est quoi exactement ? Les hommes vont-ils être remplacés par des machines ? Il a répondu à nos questions.

 

=> A lire aussi sur emedia : Les cobots, ces robots industriels de plus en plus intelligents

 

En quoi consiste votre activité ?

 

VINCI Energies à la particularité d’être constitué d’une multitude de structures autonomes, segmentées en fonction de leur domaine d’activité. Je suis à la tête d’une entreprise de 70 personnes qui réalise des installations intégrant de la mécanique et de la robotique clé en main. Nous partons d’une feuille blanche ou d’un cahier des charges établi par le client pour proposer des installations. Nous assurons également la mise en service et la formation du personnel. Nous sommes, par exemple, en train de terminer une installation pour le compte d’une entreprise de location de banches à béton qui intensifie son activité. Nous leur avons livré un process complet, avec des cabines robotisées de nettoyage haute pression.

 

On entend de plus en plus souvent parler de cobotique. De quoi s’agit-il exactement ?

 

La cobotique, c’est un moyen, non pas de se substituer aux opérateurs, mais de leur donner un outil qui puisse les soulager et les décharger de toutes les tâches pénibles, afin qu’ils puissent gagner en ergonomie tout en évitant les troubles musculosquelettiques (TMS). Le cobot est là pour assister l’opérateur et augmenter ses capacités d’effort. L’homme travaille directement en contact avec la machine, ou dans un environnement proche où il peut interagir – ou non – avec elle.

 

=> A lire aussi : le témoignage d’Exhauss, première société au monde à commercialiser des exosquelettes de travail, une forme spécifique de cobotique

 

Il faut distinguer la cobotique de la robotique collaborative dans laquelle un robot travaille en collaboration avec l’opérateur, via une zone commune d’interface, en étant à la fois autonome et asservi par l’opérateur : grâce à des capteurs posés sur le robot, l’opérateur peut interférer avec lui ou l’arrêter.

 

« La cobotique n’est pas là pour supprimer le travail de l’opérateur, mais pour le faciliter »

 

Dans le cadre de la cobotique, c’est toujours l’opérateur qui pilote manuellement, le cobot n’est pas autonome. En fait, c’est un peu comme un robot à l’envers : à travers une gouverne, l’opérateur décrit des trajectoires tandis qu’une interface munie d’un capteur d’effort génère une matrice vectorielle que l’on interprète pour établir un rapport à l’effort et à la vitesse engendrés au niveau du capteur. On peut alors piloter des moteurs qui suivent les mouvements de l’opérateur, de manière asservie en termes de vitesse, d’accélération et de décompensation d’effort. On peut y adjoindre une sensation de retour d’effort. C’est d’ailleurs ce que l’on fait en général lorsque l’on met en œuvre un cobot : on augmente volontairement le retour d’effort pour que l’opérateur ait une meilleure sensation de prise en main de la machine. Ensuite, au fur et à mesure, nous réduisons ce retour d’effort pour que l’opérateur se retrouve avec un système autoéquilibré, avec une compensation dynamique des efforts dans l’espace. C’est vraiment une aide intelligente à l’opérateur, qui rend le travail plus agréable.

 

Comment est née la cobotique ?

 

Dans le secteur du nucléaire, on trouvait déjà, non pas de la cobotique à proprement parler, mais des bras manipulateurs télé-opérés : c’est un secteur où l’opérateur ne peut pas être directement en contact avec le moyen qui se trouve dans un milieu confiné puisqu’il est exposé à la radioactivité. Les logiciels qui ont permis de développer la cobotique sont issus des algorithmes qui permettaient de piloter ces bras télé-opérés. Ils ont cependant été complètement régénérés pour la cobotique.

 

Nous avons eu notre première commande fin 2013. C’est relativement récent, mais cela résulte d’une démarche commerciale assez longue. A l’époque, nous avions été sollicités par un acteur du secteur aéronautique qui fabriquait des aubes de réacteurs à partir de barres de titane pesant jusqu’à 28 kg. Les opérateurs disposaient d’un manipulateur classique, à compensation pneumatique, qui n’était pas asservi en vitesse, comme c’est le cas avec les cobots que nous avons aujourd’hui.

 

Dans le cas de cette entreprise, les forgerons qui doivent porter les barres de titane à 920°C, après trois quart d’heure de chauffe. Une fois les barres à température, ils doivent les emmener sous la frappe à forger, en moins de trois secondes. Pour cela, ils devaient réaliser un mouvement de golfeur très répétitif pour attraper les pièces et le jeter sous la presse.

 

Le client souhaitait remplacer son manipulateur pneumatique par un modèle amélioré, plus récent. J’avais déjà rencontré une start-up qui travaillait dans le domaine de la cobotique et imaginait des outils portatifs d’aide aux opérateurs. C’est en discutant avec eux que nous avons pu imaginer un cobot remplaçant complètement le manipulateur pneumatique avec une capacité de vitesse d’accélération permettant de porter les pièces dans les temps impartis.

 

Accompagnement au changement indispensable

Pour faire adopter cette solution, nous avons mis en place une démarche itérative. Comme il s’agissait d’une technologie nouvelle, il fallait convaincre la hiérarchie et, surtout, les opérateurs. Or, c’est compliqué de faire évoluer les habitudes de personnes qui travaillent de la même façon depuis 15 ans. Nous avons directement impliqué les forgerons lors d’une phase d’ingénierie simultanée, c’est-à-dire en les faisant participer à la recherche de la solution qui permettrait de lever toute la pénibilité, tout en étant la mieux adaptée par rapport au process mis en place jusqu’alors. L’objectif était qu’ils acceptent ensuite d’utiliser le dispositif.

 

Le projet a ensuite duré à peu près un an, en incluant les phases de montage à blanc, de validation, de test avec les opérateurs et d’optimisation par rapport à leurs demandes. Il fallait qu’une fois en condition dans l’usine, ces derniers aient une bonne connaissance du cobot et puissent évangéliser leurs collègues. Pour cela, nous avons sélectionné une personne de chaque équipe pour être le promoteur de l’outil.

 

le digital pour accélérer la mutation de l’industrie

Aujourd’hui, les industriels ont-ils tous entendu parler de cobotique ?

 

Oui, ils sont bien informés. Dans le cadre du programme Industrie du Futur, des projets comme le « Factory Lab » (une plateforme permettant l’expérimentation de technologies de procédés industriels par les industriels ou les laboratoires académiques) ont permis de regrouper des industriels de différents horizons : automobile, équipementiers, aéronautique… Ils échangent sur des problématiques communes pour développer des moyens uniques. Pour cela, ils investissent sur des moyens de recherche et mettent en place des groupes de travail, auxquels nous participons puisque nous sommes partie prenante de cette démarche.

 

Il y a donc une vaste communication faite par l’Etat mais aussi par des organismes comme le Commissariat à l’énergie atomique (CEA) pour promouvoir la cobotique et la robotique collaborative. Il est néanmoins encore nécessaire de mener une politique de conduite du changement auprès des opérateurs. Aujourd’hui, ce sont plutôt les services R&D des donneurs d’ordre qui s’occupent de ces sujets. Pour installer des cobots en nombre dans les usines, il faut donc mener tout un travail d’adhésion : c’est toute une mentalité qu’il faut changer.

 

Les secteurs de l’aéronautique et de l’automobile ont été précurseurs. Avec des salons comme Smart Industries, qui prennent de plus en plus d’ampleur, le phénomène s’étend et l’on parle davantage de toute ce qui est interface opérateur : tablettes, lunettes… En fait, tout ce qui va permettre d’aller jusqu’à la maintenance, de manière collaborative.

 

A lire aussi : Patrick Hoffstetter, CDO Renault : « Il faut embarquer l’ensemble des salariés dans la transformation numérique »

 

 

Envie d’en savoir plus sur les cobots ? Découvrez ce reportage proposé par FUTUREMAG (Arte) :


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